Quel choix avez-vous fait au moment de la reprise du travail : sevrage ou poursuite de l’allaitement ? Pourquoi ?
Je suis la maman de 4 enfants, j’ai eu plein de boulots différents et j’ai toujours travaillé à plein temps. Alors des choix, j’en ai fait plein et des différents. Allaiter en même temps que travailler n’a jamais été une ambition, encore moins une lubie. Les décisions ont été prises très naturellement. J’ai préféré sevrer deux enfants et j’ai poursuivi l’allaitement en mixte pour les deux autres. Le choix s’est fait en fonction de plein de critères : le genre de boulot que je faisais à l’époque, ma relation avec l’allaitement à ce moment, ma relation avec mon corps aussi, le plaisir de mon enfant à téter… J’ai fait le point sur tous ces sujets et la décision de poursuivre l’allaitement ou pas s’est faite ensuite très logiquement. Sans aucun complexe dans un sens comme dans l’autre. Tellement sans complexe qu’encore maintenant, je dois réfléchir pour savoir quel enfant a « bénéficié » de prolongations. Je n’ai pas le sentiment d’avoir été plus intime/gentille/généreuse/exclusive avec les uns ou les autres. Je les ai simplement nourris différemment. Et comme à titre personnel, je ne concentre pas mon amour maternel dans la façon dont je nourris ma tribu, tout le monde se porte bien affectivement parlant :).
Comment vous êtes-vous organisée ?
Je n’ai jamais voulu tirer mon lait (gros souci d’image avec cette notion de « traite », ça ne me parle pas du tout), donc l’arrivée du travail a été toujours synonyme de biberon. Soit le retour à la vie active signifiait l’arrivée de ce dernier et la fin de l’allaitement, soit il signifiait le commencement du mixte si celui-ci n’était pas déjà installé. Donc je n’allaitais que le matin et le soir, ce qui n’impactait en rien mon travail. J’ai adoré cette solution : biberon avec le papa ou avec la crèche et les seins quand j’étais présente. La fameuse confusion sein/tétine dont on nous rebat les oreilles n’a jamais été un souci chez mes enfants. Sans doute parce que je n’ai jamais eu de réticence face aux biberons. Ma dernière fille est passée au mixte après trois mois de presque exclusivité sans l’ombre d’un souci. Elle ouvrait la bouche et tout faisait ventre :). Et moi, j’ai beaucoup apprécié passer le relai à son papa ou aux ainés/famille/amis… En étant honnête je pourrais même dire que le mixte a sauvé plus d’un de mes allaitements ! Enfin je pouvais souffler :).
Quelles ont été vos principales difficultés ?
Pour le coup, vraiment aucune. Autant j’ai toujours trouvé qu’allaiter en exclusivité me fatiguait physiquement et moralement (même si ce n’est pas facile de faire la part des choses avec la fatigue intrinsèque à la grossesse et l’arrivée d’un bébé), autant l’arrivée du biberon/du travail, je l’ai vraiment bien vécue. Limite attendue, comme le signal d’une nouvelle ère où je n’étais plus l’unique responsable en chef de l’opération « fais manger ton enfant ». J’entends énormément de femmes raconter le bonheur qu’elles ont de nourrir leur enfant en allaitant, la joie que leur procure ce sentiment d’utilité, de bienfaisance, les bienfaits psychologiques d’être une bonne mère nourricière… sentiments que j’ai également partagés à certains moments hein, je ne les remets pas en cause. Mais je trouve qu’on ne parle pas assez du sentiment de dépendance que ça procure (dans le sens tout dépend de toi, pas dans le sens drogue qu’on adore). Avoir allaité mes enfants est une super chose. Je n’oublie pas néanmoins l’énervement qui montait quand je réalisais qu’on ne pouvait compter que sur moi pour nourrir mon enfant, à quel point, fatigue aidant, ça me gonflait d’être l’unique référente de ce problème là . Je ne pouvais pas prêter mes seins et c’était parfois bien dommage ! Je ne pouvais pas non plus partager le poids plus ou moins léger de la culpabilité dès qu’on me demandait si mon enfant mangeait suffisamment, s’il n’avait pas faim dès qu’il pleurait… Non, c’était à moi de faire en sorte que mon enfant soit bien. Au moindre cri, c’était l’allaitement remis en cause d’une manière ou d’une autre. Rien de dramatique, j’ai régulièrement remis à leur place tout le monde, mais bon, l’arrivée du mixte et du travail a été donc le signe d’une meilleure répartition des tâches, ce qui m’a de suite été nettement mieux au teint :).
Quels ont été vos meilleurs moments ?
Mon plus joli souvenir d’allaitement, c’est quand j’ai vu mon fil ainé, sur Terre depuis quelques minutes, tout juste posé sur mon ventre, ramper de toutes ses petites forces pour venir gloutonnement positionner sa bouche sur mon sein. Là , je me suis dit qu’il fallait au moins que j’essaye de l’allaiter :), ça m’a beaucoup impressionnée. Sinon, toutes ces tétés où je me suis endormie avec une petite boule chaude contre moi… je me souviens encore de mon mari qui venait récupérer le petit pour le remettre dans son lit pendant que je dormais du sommeil du juste. Cette organisation à trois, c’est vraiment un chouette souvenir.
Qu’est-ce que vous souhaiteriez dire aux mamans qui doivent faire un choix dans les semaines à venir ?
Absolument rien… Et surtout pas d’essayer si ça leur semble compliqué. On fait tous des choix dans la vie, l’allaitement en est un parmi tant d’autres. Peut-être que notre choix sera une réussite. Peut-être pas. Je trouve dommage de dramatiser cette période et ce sentiment de succès/échec. Je crois qu’il faut mieux passer son énergie à aimer ses enfants au maximum plutôt que réfléchir à la meilleure façon de les nourrir. Sinon, on part sur un chemin jalonné de dizaines d’autres challenges aussi culpabilisants les uns que les autres. On se détend, on respire par le nez, et on fait du mieux qu’on peut… sans complexe. Au pire, on met des sous de côté pour le moment où faudra les envoyer chez le pédopsy 😀 !
Ce serait à refaire, vous referiez le même choix ? Que changeriez-vous ?
Je n’en sais fichtre rien. Je ne sais pas si j’ai fait les bons choix. Et je ne le saurai sans doute jamais. Il se trouve que j’ai l’impression que ça va. Mes enfants n’ont pas plus l’air traumatisés que d’autres. Peut-être auraient-ils été plus épanouis si j’avais fait d’autres choix ? Sans doute. Mais comme j’en sais rien, je ne me torture pas l’esprit avec ça :). Le cerveau est bien fait, il nous donne souvent raison. Profitons-en !
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- Voir l’onglet témoignages
Nous les « primipares » avons beaucoup à apprendre des mamans qui ont suffisamment d’enfants et de recul pour comprendre que ce lâcher-prise est indispensable et que la culpabilité et les noeuds au cerveau sont inutiles et ne rendent service à personne ! Merci pour ce témoignage plein de bon sens 🙂
Un très joli témoignage !
Merci pour ce témoignage plein de naturel!
J’allaite ma fille à titre exclusif depuis 3 mois et j’adooooore ça. Je suis convaincue d’avoir fait le meilleur choix possible en fonction de tous les critères qui m’entourent, au sens où c’est la meilleure nourriture pour elle et que les moments que nous partageons sont uniques.
Ceci dit, je partage TOTALEMENT ce sentiment d’être la seule à gérer l’aspect nutritif… Et parfois, oui, je suis frustrée, parce qu’occupée à une autre tâche que j’aimerais bien poursuivre et j’entends le « elle a pas faim là ? », comme si j’étais la seule référente en la matière. J’oublie vite cet agacement dès qu’elle est là , contre moi… Sans compter qu’effectivement, on fout la paix à toutes les mamans qui donnent du LA mais alors, nous, par contre, qu’est ce qu’on s’en prend : « t’as assez de lait? », « mais tu tires pas ton lait? », « ah mais t’es sortie qu’une fois toute seule en un mois, mais comment tu fais? ». Argh. Bref, ça fait du bien de lire que 1 / faudrait voire à décomplexer, et 2 / à nous lâcher la grappe : on a des seins, oui, un radar sans doute, mais ça veut pas dire que cette programmation naturelle nous engage à adorer chaque tétée ou à ne pas se sentir un peu seule, parfois.
@Cecilia
Merci de votre témoignage !